9 mai 1774 : Louis XV, le roi qui a « raté » sa mort.
Parti le 26 avril au Petit
Trianon avec Mme Du Barry et quelques intimes, le roi se réveille le lendemain
incommodé. Il est courbaturé et a mal à la tête. Il entend, cependant,
maintenir la chasse prévue. Le soir même, toujours indisposé, il se couche sans
souper. Le mal augmente. On fait venir, le 28, son Premier chirurgien qui
ordonne son transfert à Versailles. Prétextant que « c’est à Versailles
qu’il faut être malade », La Martinière le fait revenir le roi
dans sa chambre pour y être soigné. Le 29 au matin, on entame la première
saignée. Le roi est alors couché sur un lit de camp, entouré d’une foule de
médecins et d’officiers de santé qui se querellent sur le diagnostic et les
remèdes à apporter. Vers 10h30, plus de doute possible : le roi a la petite
vérole, maladie qu’il n’a pas contractée
précédemment et contre laquelle il n’est pas immunisé. On écarte la famille
royale pour éviter tout risque de contagion. Paradoxalement, une partie de la
Cour est soulagée. La maladie est connue, et le roi s’en remettra. D’autres au
contraire sont plus pessimistes.
Le fait est que les maux de tête persistent et
que la fièvre augmente. Le corps se couvre de boutons. Le 1er mai, l’état du roi semble stationnaire. Il
s’améliore progressivement à mesure de la suppuration du corps et du visage.SOURCE: CHATEAU DE VERSAILLES
« La maladie avait maintenu le suspense jusqu’au bout.
Lorsqu’elle atteignit le 8 mai la point critique, elle s’emballa et bouscula les
bienséances. Les règles de la bonne mort enjoignaient de montrer le roi
souffrant et supportant héroïquement l’épreuve en rachat de ses péchés. Mais on
s’efforçait ensuite d’épargner au public et même à la famille proche le spectacle
de la dégradation physique. Dans son cas, ce fut impossible. Le mal, empira
très vite, envahissant tout le corps et déformant puis détruisant le visage.
Lorsqu’on lui donna l’extrême-onction, le 9 au soir, il était à l’agonie. L’ambassadeur
d’Autriche crut pouvoir affirmer à sa souveraine qu’ « il avait toujours
eu l’esprit présent et donné jusqu’au dernier moment les marques d’une pénitence
et d’une piété vraiment chrétiennes » : telle est la version officielle
édulcorée. Elle s’accorde mal avec le récit terrifiant qu’en donne le duc de Croÿ,
qui assistait à l’ultime cérémonie. Les pustules avaient séché. Les croûtes durcies
scellaient les paupières, obstruaient la gorge. Si serrées qu’elles formaient
une carapace continue, elles avaient viré au noir, transformant le visage en un
masque de bronze à la bouche béante, « comme une tête de maure, de nègre,
cuivrée et enflée ». L’odeur était insupportable. Il vécut encore
vingt-quatre heures, suffoquant, râlant affreusement. Il ne perdit connaissance
que vers midi et expira à 3h15, le 10 mai.
On réduisit au minimum le cérémonial. La Cour s’était dispersée,
tournée vers le jeune couple royal. Pas d’exposition rituelle du cadavre. La
décomposition fut si rapide qu’on ne put isoler les entrailles, selon l’usage,
pour les déposer à Notre-Dame, et qu’on dut même renoncer à prélever le cœur,
qui aurait dû rejoindre ceux de ses aînés à l’église Saint-Louis des Jésuites.
Le 12 mai au soir, on le mit en bière sous une double enveloppe de plomb et un
maigre cortège portant flambeaux le conduisit à vive allure vers Saint-Denis.
On l’oublia très vite. »
Texte de Simone Bertière
Louis XV fut le seul monarque français né et mort à Versailles.
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Chronologie LE TEMPS DES LUMIERES