13 septembre 1847: le maréchal Oudinot


« C'est le Bayard de l'armée », dit Napoléon en présentant Oudinot au tsar de Russie. Du chevalier sans peur et sans reproche, il a la bravoure et le mépris du danger : 32 blessures. Prodigieux meneur d'hommes comme Ney ou Murât, remarquable tacticien comme Lannes ou Suchet, ce soldat fameux de la Révolution participe à toutes les campagnes de l'Empire sauf l'Espagne. Ses exploits à Wagram lui valent son bâton de maréchal et son titre de duc de Reggio.

Et, pourtant, le maréchal Oudinot n'avait pas eu la biographie qu'il méritait. Peut-être parce que, fidèle à la République, il appartint aux généraux hostiles à la marche de Bonaparte vers le pouvoir absolu ? Peut-être aussi parce que, après l'Empire, sa loyauté à l'égard des Bourbons en fit la cible d'une campagne de dénigrement des bonapartistes ?

Son respect de la légitimité politique, son patriotisme, son sens du devoir militaire ainsi que ses qualités « civiles » laissent entrevoir derrière le sabreur « criblé de blessures » une personnalité plus riche et plus complexe, que cet ouvrage met pour la première fois en lumière. Loin de se réduire à la seule biographie de celui qui fut tour à tour et pleinement général républicain, maréchal d'Empire et pair de France, cette suite de courts tableaux vifs et richement documentés fait aussi renaître à travers le portrait attachant du « grenadier Oudinot » un siècle tumultueux de l'histoire de France.


Extrait du prologue :

Paris, 15 décembre 1840. Le froid extrême des jours précédents s'était encore accru. La température descendit à moins quatorze degrés. Une véritable tempête de neige balayait la capitale, rappelant le froid sibérien des immenses plaines de Russie aux anciens de la Grande Armée qui accompagnaient le cercueil de Napoléon. Dans son testament celui-ci avait formulé un voeu : «Que mes cendres reposent sur les bords de la Seine, au milieu de ce peuple français que j'ai tant aimé.»
Le retour des cendres de l'Empereur avait été décidé quelques mois auparavant par une monarchie de Juillet soucieuse d'asseoir sa légitimité en affirmant sa filiation avec la Révolution. Le choix du lieu pour déposer les cendres impériales s'était finalement porté sur les Invalides, qui abritaient les vieux soldats de la Grande Armée. Le 7 juillet précédent, La Belle Poule, frégate de 60 canons, avait quitté Toulon, suivie de La Favorite, pour gagner Sainte-Hélène. L'expédition était placée sous le commandement du prince de Joinville *«Les deux frégates mouillèrent le 8 octobre dans la baie de Jamestown. L'exhumation commença le 15 à 3 heures du matin sous une pluie battante. Quelques heures plus tard fut ouvert le cercueil d'acajou, qui en enveloppait trois autres : l'un de plomb, l'autre de bois et le troisième de fer-blanc. Dix-neuf ans après sa mort, Napoléon était presque intact.
Le 18 octobre, les frégates appareillèrent pour le retour et arrivèrent à Cherbourg le 30 novembre. La Normandie, sur laquelle avait été transbordée la dépouille mortelle de l'Empereur, remonta ensuite la Seine en faisant étape à Rouen où les quais, décorés de trophées militaires étincelants d'armes, étaient couverts d'une foule dense, et atteignit le port de Courbevoie le 14 décembre.
Seuls des vingt-six maréchaux de l'Empire, Soult, Moncey, Grouchy et Oudinot étaient là pour l'honorer. Macdonald était mort au début de l'année dans sa propriété de Courcelles-le-Roi. Victor n'avait pas voulu venir. Bernadotte, qui se trouvait à la tête de son royaume de Suède, ne pouvait quitter Stockholm. Marmont, discrédité, s'était volontairement exilé et errait tristement de Saxe en Bohême, de Bohême en Styrie et de Styrie en Italie.
La translation des cendres revêtit un caractère grandiose. Partant des bords de la Seine à Courbevoie, le cortège s'ébranla à 8 heures du matin, encadré de troupes en grande tenue. Il s'avançait lentement, suivi des plus hauts personnages civils et militaires de l'État. Le prince de Joinville marchait en tête du convoi, portant le grand cordon de la Légion d'honneur sur son uniforme de capitaine de vaisseau. Le char funéraire, haute masse pyramidale d'une dizaine de mètres, était tiré par seize chevaux caparaçonnés d'or. Il était constitué d'un mausolée reposant sur un socle orné d'aigles à chaque angle. Deux immenses faisceaux de drapeaux pris sur toutes les nations d'Europe se balançaient à l'avant et à l'arrière du char. Le maréchal Oudinot tenait l'un des cordons du poêle. Cette lourde draperie de velours violet semée d'abeilles, qui recouvrait le catafalque, était rehaussée de franges d'or et ornée de la couronne et des armes impériales. Le maréchal Molitor, l'amiral Roussin et le général Bertrand tenaient les trois autres cordons.


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Leurs noms sonnent encore glorieusement à nos oreilles et ils ont baptisé nombre de grandes artères à travers toute la France. Issus de milieux très divers (apprenti, mousse, fils de chirurgien, membre de la petite noblesse, etc.), ils ont choisi très jeunes le métier des armes et, sans compter sur le moindre passe-droit, ils sont partis du bas de l’échelle sociale pour gravir peu à peu les échelons militaires uniquement par leurs actes héroïques.
Honneur suprême, ils ont été remarqués par Napoléon Ier qui les a faits maréchaux. Plus ou moins honnêtes, plus ou moins scrupuleux, plus ou moins clairvoyants (mais toujours prêts à mener leurs troupes au combat et à braver les pires dangers), ils ont accumulé des richesses dans les territoires conquis et ont été pourvus de titres de noblesse qu’ils ont transmis à leurs descendants.