7 mars 1932 : Mort d'Aristide Briand

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Aristide Briand (1862-1932) est à la fois célèbre et méconnu.

En dépit de la multitude de rues qui portent son nom, du prix Nobel de la paix qui lui a été décerné en 1926, et de sa popularité dans les dernières années de sa vie, il n'occupe pas dans la mémoire nationale la place qui lui revient. Comme si les insultes de l'Action française et l'inimitié de certains ténors de gauche et de droite brouillaient toujours son image ; comme s'il avait bien été l'inculte et paresseux politicien opportuniste, l'anticlérical à tous crins et sur ses vieux jours le pacifiste bêlant livrant la France à l'Allemagne que ses adversaires ont dépeint. Quelle injustice !


Voilà au contraire un homme parti de positions extrémistes (la grève générale...) et venu aux affaires afin de concilier les inconciliables. Sans lui, qui fut le rapporteur de la loi de séparation des Églises et de l'État en 1905, la question religieuse aurait pu tourner à la guerre civile : il a su amener les protagonistes à se ranger à un texte de compromis toujours en vigueur. Avant et pendant la Grande Guerre, il fut un bien peu pacifiste ministre et président du Conseil, élaborant en 1913 la " loi des trois ans ", imaginant en 1915 l'expédition de Salonique afin de prendre les empires centraux à revers et menant une diplomatie au service de la victoire, notamment au moment de Verdun. Une fois la paix revenue, il tente avec lucidité et fermeté de tirer le meilleur parti du nouveau système international (SDN) pour contraindre l'Allemagne à jouer le jeu. Toujours pour assurer la sécurité de la France, sa préoccupation première, il se fait le " pèlerin de la paix " et promeut un projet d'union européenne qui ne verra le jour qu'à la fin des années 1950.


Ce parlementaire à la belle longévité (1902-1932), cet orateur hors de pair sachant convaincre, ce grand homme d'État (de multiples fois président du Conseil et ministre des Affaires étrangères), cet esprit libre (il ne s'est pas longtemps accommodé des lourds et dogmatiques appareils politiques) s'est voué à la chose publique exclusivement, délaissant une carrière d'avocat qui s'annonçait brillante et ne sacrifiant guère à la vie privée - célibataire, il eut de nombreuses aventures et quelques amours durables (parmi lesquelles la
comédienne Berthe Cerny et Marie Bonaparte).


Il était nécessaire de remettre Aristide Briand dans la galerie des hommes illustres de la République. Gérard Unger y est parvenu avec science et talent.


Lire également : Aristide Briand, père de la Loi de séparation, du socialisme au libéralisme
 et le livre de Gérard Unger ci-dessous.