11 mai 1745, Fontenoy : "Messieurs les Anglais, tirez les premiers !"



D’un côté la France, la Prusse, l’Espagne, et de l’autre la Grande Bretagne, l’Autriche et les Provinces Unies (Pays-Bas) s’affrontent dans une guerre européenne dans le cadre de la Guerre de Succession d’Autriche.

La Guerre de Succession d'Autriche commença en 1739 par la 'Guerra del Asiento de Negros' appelée par les Anglais 'Guerre de l'Oreille à Jenkins', entre l'Espagne et l'Angleterre. Cette dernière souhaitait se faire octroyer par la force une prolongation du monopole de la Traite des esclaves à destination de l'Empire espagnol. Vaincue par l'Espagne, l'Angleterre allait profiter du problème de Succession d'Autriche pour rassembler une coalition contre l'Espagne et la France. Officiellement, l'objectif de cette guerre de Succession d'Autriche était de soutenir Marie-Thérèse d'Autriche. Officieusement, ce n'était pas le cas ; l'Angleterre la subventionna afin d'obtenir le lucratif contrat de l'esclavage.

   

Charles VI, l’empereur romain germanique de la maison des Habsbourg d’Autriche, meurt le 20 octobre 1740.  Sa fille, Marie-Thérèse d’Autriche hérite des territoires des Habsbourg, suivant l’édit appelé « La Pragmatique Sanction » (promulgué en 1713 par Charles VI). Bien que l’édit ait été ratifié par les nations européennes, la jeune héritière (de 23 ans), inexpérimentée, est l’objet du jeu politique des princes de sa famille, notamment Charles-Albert, électeur de Bavière.

Frédéric II, roi de Prusse, décide de prendre les devants et envahit la province de Silésie, propriété autrichienne.

Louis XV, suivant me comte de Belle-Isle, est favorable à une intervention française pour favoriser Charles-Albert et Frédéric II et contribuer ainsi à grandement affaiblir l’Autriche. Le Cardinal de Fleury était, quant à lui, favorable à une solution pacifique de la crise. Belle-Isle est nommé Maréchal et, le 5 juin 1741, la France, qui a reçu de la Bavière et de l’Espagne, reconnait les conquêtes prussiennes en Silésie. L’Autriche reçoit le soutien de la Grande-Bretagne ainsi que des Provinces Unies – c’est-à-dire les Pays-Bas. Débute alors la « Guerre de Succession d’Autriche ».

Les combats se déroulent d’un côté entre la Prusse et l’Autriche. De l’autre, les Pays-Bas autrichiens (envahis par la France en mai 1744), la France est aux prises avec les Autrichiens et les Anglais.

Les troupes ennemies se retrouvent en mai 1745 dans une plaine près du village de Fontenoy, dans les Pays-Bas autrichiens. Le 8 mai, le roi Louis XV a rejoint son armée de 47 000 hommes commandée par le Maréchal de Saxe. En face, le jeune Duc de Cumberland, fils du roi de Grande-Bretagne Georges II, est confiant et compte sur ses 51 000 soldats (anglais mais aussi hollandais, hanovriens et autrichiens) pour infliger une sévère défaite aux français: « J’irai à Paris ou je mangerai mes bottes ! » pérore-t-il… 

La bataille commence le 11 mai 1745 vers 5h du matin par de violents tirs d’artillerie.

Vers 9h, des régiments hollandais montent à l’assaut du village. Mais l’artillerie française les repousse violemment. Cumberland ordonne alors aux régiments anglo-hanovriens de monter en ligne. Avec un remarquable sang-froid, les britanniques parviennent à arriver au contact de la première ligne française malgré une forte réaction de l’artillerie.

A 11h, les deux lignes ennemies se font face. Dans les rangs français, la nervosité est grande. Un coup de feu part sans ordre, suivi d’un autre, puis de plusieurs autres, pour finir par un tir complètement désordonné de toute la première ligne française. Les britanniques ripostent par un feu coordonné et donc beaucoup plus meurtrier. Ils commencent à enfoncer les rangs français, jusqu’à mettre un moment en péril tout leur dispositif. Le Maréchal de Saxe ordonne une série de violentes contre-attaques appuyées par l’artillerie et la cavalerie qui parviennent à stopper l’avance des soldats de Cumberland. Les anglo-hanovriens subissent désormais l’initiative de leurs adversaires.

Vers 13h, le Duc de Cumberland réalise que la bataille de Fontenoy est perdue. Des renforts français arrivent sur le champ de bataille. Il ordonne à ses troupes de se retirer, ce qu’elles parviennent à faire dans un ordre relatif, non sans perdre quelques drapeaux.

La bataille de Fontenoy est restée plus célèbre pour la phrase si « courtoise et noble » du Comte d’Anterroches que pour son importance stratégique. Selon la version du capitaine Hayes (écrite dans une lettre à son frère trois semaines après la bataille), un officier anglais du 1rst Guards britannique, explique que pour se moquer ouvertement des Français, il avait sorti de sa tunique une petite flasque d’alcool en raillant ses ennemis et en leur montrant bien haut sa petite bouteille. Apercevant cet anglais braillard et gesticulant, le Comte d’Anterroches se méprend sur ses intentions et pense qu’il l’invite de manière chevaleresque à ordonner le feu le premier. Il lance alors une réponse courtoise à l’anglais : « Monsieur, nous n’en ferons rien ! Tirez vous-mêmes ! ». Dans son « Précis du siècle de Louis XV » en 1768, Voltaire ne mentionne pas la méprise d’Anterroches et explique que Hay se serait avancé pour proposer courtoisement aux français d’ouvrir le feu… Toujours est-il que la mémoire populaire retiendra une version de la réponse devenue fameuse : « Messieurs les Anglais, tirez les premiers ! »

LIRE EGALEMENT LA FICHE DE LOUIS XV